C'est tellement facile de concentrer ses peurs et ses colères dans les silhouettes des plus faibles, cibles faciles, cibles fantasmées, les migrants, qui viendraient voler, violer, prendre le pain de la bouche de nos pauvres à nous : c'est ce qui ressort de commentaires hystérisés, postés sur les réseaux sociaux, à la suite d'un post sur la venue de... trente migrants à Vierzon ! Trente migrants sur une population de 27.000 habitants, accueillis dans des structures adéquates.
Les anti-migrants se déchaînent, commencent à se barricader, craignent pour la République... L'excuse ? Il faudrait d'abord s'occuper de nos pauvres, de nos SDF, de nos retraités sans le sou, de nos chômeurs sans indemnités, de notre misère, bien blanche, bien française, notre misère made in France pour ceux qui aiment les produits français. Ils sont servis.
Tous ces idiots utiles au protectionnisme dangereux ne font même pas la différence, entre un pays en guerre où des civils meurent sous les bombardements et un pays en guerre contre le chômage et la misère, comme la France ou, nous en sommes là. Mais pas de la faute des migrants. Parce que trente migrants arrivent à Vierzon, l'équilibre de notre société s'en trouverait changer ?
Surtout,lit-on, ce ne sont pas des gens de chez nous, qu'on les aide chez eux mais c'est tout, du bout des doigts. Ah oui, allez y alors, dans ces pays qui crachent du feu de toutes parts pour aider des gens qui n'aspirent qu'à une seule chose : ne pas profiter des pays riches non, ne pas être libres, non, vivre. Vivre, une envie qui va au-delà de manger, boire et dormir, une envie qui va au-delà de toutes les autres. Une envie que nous ne connaissons pas parce que nous ne luttons pour vivre, nous luttons pour une vie meilleure, c'est un cran au-dessus.
Mais nous, dans nos conforts, même relatifs, savons nous ce que c'est qu'avoir envie de vivre ? Pas vivre toujours mieux, non, vivre tout simplement. Ne pas craindre de mourir au coin d'une rue. Alors, les anti-migrants se déchaînent, incapables d'assumer leur racisme ordinaire, ils ne veulent pas des migrants parce que, nous avons des SDF dans nos rues, des retraités payés une misère, des travailleurs pauvres qui dorment dans leurs voitures, des smicards qui peinent à boucler leurs fins de mois Oui, ça existe. Et ce ne sont pas les migrants qui ont inventé ce système, ils n'en sont même pas à l'origine.
Non, mais il vaut mieux leur taper sur la tête que de s'en prendre aux puissants, aux politiques qui entretiennent le système, par exemple. C'est vrai, mieux vaut cracher sur la venue de trente migrants à Vierzon, faire la démonstration qu'ils vivent à nos crochets, plutôt que de dénoncer ces politiques qui vivent aux nôtres, qui n'ont pour la plupart, aucune conscience du travail, qui funambulent sur le fil des avantages et somnambulent toute une vie, aux frais des contribuables. Est-ce plus choquant d'accueillir et de nourrir un migrant qui risque de mourir que d'entretenir une somme de politiques qui risquent seulement de ne pas être réélus au prochain mandat ? Les anti-migrants s'en prennent-ils à eux, au système, au capitalisme aveugle ? Oui ? Non ?
Les anti-migrants préfèrent s'élever contre le faible, lui trouver tous les défauts, lui mettre sur le dos tous les maux de la terre plutôt que de montrer du doigt, ces éternels élus qui promettent à tort et à travers, qui font partie de la bourgeoisie française pour les plus gradés. Et il faudrait se recroqueviller sous nos petites ailes, s'auto-suffire.
Les anti-migrants crachent leur venin et disent à ceux qui sont pour les accueillir : "vous n'avez qu'à en prendre un chez vous" ! Mais qui a dit qu'il fallait les accueillir chez soi ? "Je ne bosse pas pour les migrants", ah non, mais pour des élus qui gagnent, sur votre dos, trois ou quatre fois plus que vous ! Et vos impôts, pour ceux qui ont la chance d'en payer, ils vont où ? Pensez-vous qu'ils tombent dans la tasse d'un SDF ? Qu'ils servent toujours une bonne cause ?
Rassurez-vous, on ne va pas ouvrir vos frigos pour se servir dedans, ni vos placards, ni vos armoires, ni vos porte-monnaie. Dormez tranquille. Vous ne pouvez pas vous imaginer comme la vie est belle quand on peut au moins prétendre en profiter. Mais ce n'est qu'un problème lointain : interpellez plutôt vos élus, harcelez-les pour qu'ils trouvent des solutions aux SDF, aux retraités sans le sou, aux travailleurs pauvres. Ce sont eux qui nourrissent le système et qui, du moins le pense-t-on, ont le pouvoir de le changer. Pas les migrants. Et foutez la paix aux migrants. Laissez les au moins vivre sous un ciel qui ne crache pas de bombes. Vivre, c'est tellement légitime.