Voilà le meilleur moyen de décrédibiliser un mouvement : "Chers Gilets jaunes, n'oubliez pas nos amis journalistes qui passeront toute la journée du samedi 24 Novembre dehors par ce froid. Pensez à leur apporter de quoi se restaurer : tomates, œufs, farine, tartes à la crème." C'est ce qu'on peut lire sur la page Blocage Vierzon. Dommage que l'énergie des gilets jaunes à faire entendre leur colère légitime se noie dans ce genre d'appel incivique. On croirait Mélenchon qui éructe contre les médias qui ne lui font pas allégeance. Et cela ne sert aucune cause.
Si les gilets jaunes avaient été victimes de censure, les journaux nationaux, régionaux, les télés et les radios n'auraient pas consacré des directs, des pages entières, des ouvertures de journaux télévisés, aux gilets jaunes. Si le mouvement se déroule sur le terrain, dans le blocage des giratoires, des péages d'autoroutes, il se fait aussi et surtout sur les réseaux sociaux. Avec ce qu'il traîne dans leur sillage.
Une idée d'étincelle suffit à mettre le feu. Comme cet exemple de France 3 accusé de censure parce qu'une journaliste évoquait une intervention des CRS. Tenter de prouver que c'est une fausse nouvelle ajoute de l'huile sur le feu car pour certains qui doivent boire à la source de la fachosphère, démentir une fausse nouvelle revient à théoriser un complot pour cacher une réalité. On tourne en rond. Mais mâcher un mensonge ne permet pas de recracher une vérité.
Les gilets jaunes sont partout dans les médias. Et il existe des médias d'opinion, dans notre démocratie, même si certains font des rapprochements douteux pour faire croire à une dictature. Qu'ils aillent y vivre, dans les dictatures, ils verront la différence, car à un certain moment, on peut être solidaire de certaines revendications des gilets jaunes, mais il faut arrêter de dire n'importe quoi, le répandre et en le répandant, faire croire que parce que ce n'importe quoi est répété par le plus grand nombre, il devient vrai. Non, il reste toujours faux.
Alors, stigmatiser certains parce qu'on croit dur comme fer qu'ils ne sont pas d'accord avec vous ou qu'ils vous nuisent, ce n'est ni l'essence de la liberté d'opinion, ni celle de la liberté d'expression. Il faut montrer l'action des gilets jaunes, expliquer leur colère, mais il faut montrer aussi les gens qui ne sont pas d'accord et qui subissent le mouvement, parce qu'en France, on peut encore le faire. A moins que certains aimeraient imposer les sujets aux journalistes ? Leur tenir le stylo ? Filmer les images à leur place ? Ecrire les articles pour eux ? Alors, ce genre de message douteux, qu'il s'adresse à la presse, ou à d'autres catégories de personnes, est nuisible. Et si le dire, c'est prendre le risque de se faire fustiger par le mouvement, alors c'est un risque à prendre. Parce que la liberté qui nous est offerte nous le permet. Aux uns de bloquer des giratoires. Aux autres de ne pas adhérer à ce genre de message qui appelle à une certaine forme de violence. Et toute violence est intolérable.