Finalement, tout va (presque) bien jusqu'à la page 172... Jusqu'à ce que la seconde partie du livre d'Amélie Antoine plonge ses doigts dans la vie d'Orlane et de Sarah, jusqu'à ce que Orlane et Sarah se mettent à parler à la première personne. Jusque-là, disons jusqu'aux 172 premières pages, Sarah et Orlane sont deux jeunes filles de deux familles différentes dont a suivi le parcours. On se dit, bon ben oui, voilà la vie deux familles avec leurs hauts et leurs bas, leurs joies, leurs tristesses. Et d'un seul coup, on comprend pourquoi le titre "Raisons obscures" et la seconde partie du livre vous tient éveillé jusqu'à la toute fin.
Voilà un livre qui montre de k'intérieur, le harcèlement scolaire d'une jeune fille, Orlane devenue la proie de Sarah. Cette dernière a peut-être tout pour être en colère. Cette adolescente est diabétique et doit traîner une pompe à insuline qu'elle cache tout comme cache aux autres, sauf à quelques profs, sa maladie.
Dans leurs famille, elles sont deux ados, l'une renfermée (Orlane), l'autre éruptive (Sarah). Rien ne laisse présager que leurs destins se sont croisés de cette façon. Amélie Antoine creuse son sujet à la petite cuillère. Elle décortique les familles, façon plateau fruits de mer et petit à petit, nous entraîne dans l'obscurité d'Orlane, dans la méchanceté de Sarah. Au fil des mots, l'édifice se met en place.
A la fin de la première partie, on se doute qu'un truc cloche. Mais jamais le lecteur n'aurait pu penser à cela. C'est un roman dur, mais qui montre le mécanisme pervers du harcèlement, des deux côtés, celui du bourreau, celui de la victime. Les questionnements, les renoncements, tout s'imbrique pour ne pas laisser le moindre doute sur la complexité de celle qui harcèle et ce celle qui subit. Une fabuleuse découverte que ce livre que nous vous conseillons vivement.
Raisons obscures d'Amélie Antoine aux éditions XO. 378 pages. 19,90 euros.