La communauté de communes de Vierzon consulte les syndicats à propos du projet Virtuo, la future plateforme géante du parc technologique. Guilaine Taupin, Présidente de l'Union Départementale CFE-CGC du Cher, a assisté à la présentation du projet ce mardi. Elle a accepté de répondre aux questions de Vierzonitude.
La communauté de communes de Vierzon consulte les syndicats sur le projet Virtuo. D'un point de vue syndical, quel est votre avis sur ce projet de plateforme logistique géante ?
Les syndicats du Cher représentatifs au niveau national avaient répondu à l'appel de la Communauté de Communes, en février dernier, et avaient accepté le principe de faire partie d'une “commission de suivi”. Comme le rôle des syndicats est d'être présent dans des commissions paritaires concernant le social, l'emploi, et les réunions des organismes d'état, c'est tout naturellement que l’Union Départementale CFE-CGC du Cher que je représente s'intéresse à ce projet. Et quoi de mieux que d'avoir l'information directement à la source ?
Concernant le contexte de sous-emploi à Vierzon, il est de fait qu'un projet d'une telle ampleur et prometteur d’emploi, puisse retenir l'intérêt d'un point de vue syndical. Formés aux changements dans nos entreprises, à la surveillance du respect des droits du travail, et aux évolutions en la matière, que ce soit au sein de nos Comités d'Entreprises (CSE), ou lors des négociations de modification des conventions collectives, il apparaît comme important d'avoir un rôle de surveillance, de défense des intérêts des futurs salariés, et d'être au départ d'un tel projet pour mieux en appréhender les éventuelles incongruités.
Ainsi, l'objectif syndical est que ces emplois promis soient pérennes, reconnus et qualifiés, que la formation soit assurée, avant et pendant l'emploi, et rémunérés en conséquence.
Vous a-t-on dit quelle entreprise allait s'installer ?
Nous n'avons pas eu de réponse à cette question. L'objet de la réunion était de présenter le projet d'installation de l'infrastructure, évoquant l’attractivité du point de vue économique (autoroutes, rail, etc.…) et la situation du bâtiment, sur un parc technologique pensé depuis 2009/2010, (label programme territoire de l'industrie obtenu depuis), son impact écologique maîtrisé avec des constructions ayant le label bio diversité, (des panneaux solaires sur surface utile de la toiture, et des dispositifs de "décarbonage" des bâtiments)
Votre point de vue sur les emplois proposés ?
Est-il utile de rappeler les taux de chômage des jeunes sur le territoire de Vierzon et en zone rurale, ainsi que le taux de sans emploi des seniors dans le Cher plus haut que le niveau national. Est-il besoin d’évoquer une population mal formée, et difficilement adaptée à l’emploi ? De plus, la CFE-CGC a une inquiétude grandissante concernant l'après Covid, qui va entraîner un flux supplémentaire de personnes sans emploi.
Ainsi, même si l'échéance semble bien lointaine, il faut ramener une partie de la population vers l'emploi, et il faut du temps pour cela, (la jeunesse en errance, les salariés loin de l'emploi depuis trop longtemps, ...)
Les emplois de la logistique ont l’intérêt de couvrir une large palette, allant du manutentionnaire peu qualifié, magasiniers, chefs d’équipes, gestionnaire stock, agents de maitrises, managers, etc…. Ce sont des emplois qui nécessitent temps plein, et non coupées comme peuvent l’être ceux de caissières, ou de services à la personne, qui trop souvent ne permettent pas de vivre dignement.
L’investisseur a évoqué le fait qu’ils travaillaient avec la CARSAT (concernant leur compétence lié à la « santé au travail »), anticipant ainsi l’aménagement des locaux.
Mme La Sous-Préfète et M. le Vice-Président de la Région, présents, nous ont présenté le travail et les méthodologies communes avec les acteurs liés à l’emploi du département, afin d’anticiper le besoin de personnel. Ils nous ont présenté l’idée d’un guichet unique qui proposerait au futur employeur des salariés formés. L’idée semble effectivement intéressante pour ramener à l’emploi ceux qui en sont éloignés. Identifier le potentiel des personnes éloignées de l’emploi, et d’en toucher un maximum pour les intéresser à postuler.
On parle aujourd'hui de 300, 400 emplois ? Le projet vous semble-t-il crédible ?
Franchement, même 200 emplois seraient une aubaine pour notre territoire. Alors crédible ou pas, soyons optimiste, nous en avons besoin. Etant donné la position de Vierzon, cela peut convaincre d’autres investisseurs, et de fait peut créer beaucoup plus d’emplois.
Les détracteurs à ce projet évoquent des nuisances sonores, de la pollution et des emplois non pas précaires mais sous-rémunérés ? La communauté de communes balaie-t-elle ces doutes ? Et comment ?
La communauté de commune n’a pas évoqué les détracteurs. L’échange a consisté à la présentation du projet dans les détails, et réponse à nos questionnements techniques. Nous, syndicalistes avons justement évoqué nos doutes, quant à l’utilisation d’employeurs indirects, d’emplois précaires, contrats courts, ou nos souhaits de voir intégrer le « port sec » et le rail, ceci dans le but de limiter les impacts liés à une activité supplémentaire de camion, l’idée d’amener des transports publics afin de limiter les véhicules légers, inciter le co-voiturage, etc…
Concernant l’emploi sous-rémunéré, ce n’est hélas pas uniquement lié à ce projet, et la CFE-CGC préfère des emplois rémunérés que pas d’emploi du tout. Notre rôle est de faire en sorte que les conventions collectives soient respectées, à travail égal =salaire égal, à responsabilité = rémunération en conséquence, et égalité salariale homme-femme trop souvent négligée chez le personnel d’encadrement. Nous assistons depuis quelques années à une dévalorisation des diplômes et ainsi des salaires, dans toutes les branches d’activité. La résultante est que la main d’œuvre qualifiée commence à manquer, fuite vers d’autres régions, ou salaires peu attractifs pour s’installer dans le Cher, c’est à tous les employeurs d’en tirer les conséquences, pas uniquement ceux qui projettent de s’implanter.
Pensez-vous vraiment que si une entreprise privée s'installe, elle acceptera que les élus et les syndicats mettent le nez dans le recrutement et les rémunérations ? N'est-ce pas utopique ?
L’expérience nous prouve que ce sont dans les entreprises ayant un ou plusieurs syndicats en son sein que les rémunérations sont les meilleures, que la « qualité de vie au travail » et la bienveillance sont la norme, avec conséquence une meilleure productivité. Bien sûr, (sourire) aucun employeur ne sollicite des syndicats, il s’agit d’un droit que les salariés eux-mêmes doivent s’approprier, et nous Unions Départementales, sommes et seront à l’écoutes de ces salariés pour les accompagner (et je précise qu’il s’agit d’un employeur privé ou public, les syndicats ont les mêmes rôles).
D'un côté des centaines d'emplois (promis), de l'autre une circulation accrue de poids-lourds.... Pensez-vous que l'environnement et l'économie sont incompatibles ?
La question reste de savoir si nous souhaitons une décroissance ou pas, de savoir si les consommateurs eux-mêmes n’ont pas une responsabilité dans leur comportement d’achats ? Je renvoie la question, si ce projet voit le jour un peu plus au sud, n'aurons nous pas une circulation accrue de poids-lourds sans les avantages des emplois ? Cela a été évoqué durant cette réunion : revenir au ferroviaire reste la solution.
Quand à l'environnement et l'économie incompatibles, c'est assurément aux politiques, et à nos élus d'apporter les solutions pour une économie durable dans un environnement agréable.
La communauté de communes veut faire payer le contribuable pour que l'autoroute soit gratuite entre les deux péages. Est-ce vraiment une bonne idée ?
Je n'ai pas entendu cette information aujourd'hui.