Si vous êtes passé devant l'esplanade de la Société-Française, vous aurez constaté qu'une peinture géante recouvre les pavés. Non, ce n'est pas un marquage au sol pour interdire le stationnement, c'est une œuvre. L'artiste a choisi le bleu, le bleu turquoise, le jaune citron et le blanc. On apprend dans la presse locale que ces couleurs n'ont pas été choisies par hasard. Et là, on est suspendu à la suite, la voici : "Ce sont mes couleurs préférées, précise la dessinatrice. Mais elles n’ont aucune signification." Evidemment, à ce stade-là, la déception est violente. Nous pensions, nous, novices en la matière, que l'artiste avait un message à délivrer dans ces couleurs, que nenni. C'est juste parce que ce sont ses couleurs préférées...
La poilade n'est pas terminée. "L’idée m’est venue en visitant les mosaïques antiques". Parfait. Mais quel est le rapport avec le site de la Société-Française, pur joyau industriel du XIXème siècle ? En quoi les mosaïques antiques peuvent avoir un lien avec le patrimoine agricole et industriel ? Vite, un Doliprane, la migraine nous guette.
Alors, comme on ne sait pas trop ce que signifie cette œuvre, voilà la phrase passe-partout : "Chacun pourra interpréter le sens de l’œuvre à sa guise. Cette œuvre, je la vois un peu comme la promenade des philosophes antiques". Ah c'est ça, on se disait aussi, il y a quelque chose de philosophique à déambuler, dans le vide de cette esplanade. Nous voilà rassurés sur le sens de nos prochaines déambulations.
On apprend aussi que l’œuvre se compose de différentes formes, que l'artiste appelle des « Felder », c’est-à-dire des champs. Mettre des champs devant une ancienne fabrique de tracteurs, là, ça a du sens. Pour le reste, on est dubitatifs, c'est le moins...
Mais "j’ai déjà le sentiment que le travail au sol suscite la curiosité des gens qui passent par là par hasard et qu’il est accepté. Je trouve cela bien et j’espère que l’attention sera encore accrue avec les dessins que je suis en train de rajouter", nous dit encore l'artiste, dans la presse locale. Ceux qui auront l'esplanade à nettoyer après la biennale d'arts contemporains rigolent déjà moins... Ah, c'est fait pour rester ? Bon, ben, on prendra notre mal en patience en espérant que la peinture est de mauvaise qualité alors...