Ah, les passerelles de la Case de la rue Maxime Gorki avant qu'elle ne change de nom pour devenir la rue de la Société Française. Combien de poids lourds sont restés coincés dessous ? Combien de salariés ont traversé ces passerelles (deux, rue Maxime Gorki) pour passer d'un atelier à un autre ?
C'était ce temps où l'Usine battait comme un cœur au beau milieu de la ville de Vierzon : une forteresse de sept hectares qui a pris racine en 1847, entre la gare et le canal de Berry. Les passerelles ont disparu quand il a fallu réinvestir cette friche après le départ de la Case. Les passerelles ont disparu (il n'en reste qu'une rue Bernard Palissy), et à la veille d'une réhabilitation des nefs restantes, il était bon de revenir un peu en arrière.
Bien sûr, l'époque n'était pas non plus glorieuse : en l'absence d'autoroute, deux mille poids lourds traversaient chaque jour Vierzon, les uns pour aller à Orléans ou Tours, les autres pour prendre la direction de Bourges. Mais diront encore d'autres, "il y avait du boulot", une usine, la Case, avec des centaines et des centaines de salariés.
Les passerelles bouchaient le ciel, elles empêchaient parfois de laisser passer des camions, elles striaient cette rue d'une drôle de façon. Mais quand la Case est partie, au milieu des années 1990, jamais personne auparavant ne s'était soucié de ce qu'on allait faire de tout cet espace parce que l'Usine devait être éternelle.
Presque trente ans plus tard, l'intégralité du vide n'est toujours pas comblé et rien n'est prévu pour rappeler la grandeur de ces lieux et de toutes celles et tous ceux qui en furent les acteurs de premier plan.
La mémoire est en pointillé, ici, on ne se souvient de ce que l'on veut bien se souvenir, de ce qui fait rutiler le présent. Des pans entiers du passé sont ainsi résumés à leur plus simple expression et on peut se demander ce que deviendront de nombreux chapitres de notre histoire. Sans doute, pensera t-on qu'elle n'a jamais existé.
Et que le présent d'aujourd'hui fera une mine bien triste à côté de ce que l'on aura perdu, sans jamais se baisser pour le ramasser.