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Vierzonitude

Le blog que personne ne lit... mais dont tout le monde parle


Quand on allait au bistrot en bateau pneumatique

Publié par vierzonitude sur 15 Juillet 2024, 05:10am

Quand on allait au bistrot en bateau pneumatique

C'était l'une des rares fois où j'allais au bistrot en bateau pneumatique. En fait, ça n'arrivait que lorsque les eaux vierzonnaises avaient trop bu et tombaient, raides mortes, de leur lit. Entre le Cher et l'Yèvre, deux rivières un peu trop portées sur la bouteille, les crues étaient monnaie courante. 

Les rues devenaient des canaux, les maisons des marécages, le pont du Cher le mètre étalon où les eaux bouillonnaient comme des boissons gazeuses secouées dans tous les sens.

Ce matin-là, le comble était à son comble : mon caboulot, A la source du bois tordu, avait laissé son robinet ouvert, du coup la source s'était répandue dans le bistrot, dans la rue, sur les bottes en caoutchouc des premiers clients, elle s'était affalée sur les trottoirs comme une pochtronne inoffensive peut être mais collante comme un papier attrape-mouches.

N'empêche, pour accéder au comptoir de l'extérieur, le bateau pneumatique était la seule solution pour se glisser un café-croissant sous le tee shirt ou pour les plus téméraires, un petit blanc forcément pas sec du tout. 

Un bistrot sous-marin, voilà qui avait de la gueule dans le quartier, la seule ride de bonheur dans ce bordel humide.

C'est tout juste si l'on souhaitait que les eaux restent pour laisser les bagnoles au clou et prendre l'habitude d'embarquer dans le bateau pour le rade matinal. On aurait rebaptisé les lieux A la source qui déborde, on aurait creusé la route pour avoir du fond, y poser des barques et des péniches, et le café de la Marine, dans la rue des Ponts voisine aurait tiré une tronche de six pieds de long.

Mais les eaux sont parties, sauf celle du Ricard parce que même les pieds dans l'eau, la raison du bistrot ne cèdera jamais à la raison des habitudes. 

Bien des années plus tard, je suis repassé à pied, le café-bar avait fermé, monument devenu invisible. dans cette ville de crue, le bistrot était cuit. N'empêche que toute ma vie, je me rappellerai être allé au café en bateau. J'ai quelques larmes qui débordent, une crue de chagrin quand je pense que les pieds dans l'eau, on avait le sourire aux lèvres. 

Mais si le bistrot n'avait pas été là, on aurait été noyé de chagrin. Un comptoir c'est solide comme un roc. Mais trop facilement soluble dans le temps.
 

C'était l'une des rares fois où j'allais au bistrot en bateau pneumatique. En fait, ça n'arrivait que lorsque les eaux vierzonnaises avaient trop bu et tombaient, raides mortes, de leur lit. Entre le Cher et l'Yèvre, deux rivières un peu trop portées sur la bouteille, les crues étaient monnaie courante. Les rues devenaient des canaux, les maisons des marécages, le pont du Cher le mètre étalon où les eaux bouillonnaient comme des boissons gazeuses secouées dans tous les sens. Ce matin-là, le comble était à son comble : mon caboulot, A la source du bois tordu, avait laissé son robinet ouvert, du coup la source s'était répandue dans le bistrot, dans la rue, sur les bottes en caoutchouc des premiers clients, elle s'était affalée sur les trottoirs comme une pochtronne inoffensive peut être mais collante comme un papier attrape-mouches. N'empêche, pour accéder au comptoir de l'extérieur, le bateau pneumatique était la seule solution pour se glisser un café-croissant sous le tee shirt ou pour les plus téméraires, un petit blanc forcément pas sec du tout. Un bistrot sous-marin, voilà qui avait de la gueule dans le quartier, la seule ride de bonheur dans ce bordel humide. C'est tout juste si l'on souhaitait que les eaux restent pour laisser les bagnoles au clou et prendre l'habitude d'embarquer dans le bateau pour le rade matinal. On aurait rebaptisé les lieux A la source qui déborde, on aurait creusé la route pour avoir du fond, y poser des barques et des péniches, et le café de la Marine, dans la rue des Ponts voisine aurait tiré une tronche de six pieds de long. Mais les eaux sont parties, sauf celle du Ricard parce que même les pieds dans l'eau, la raison du bistrot ne cèdera jamais à la raison des habitudes. Bien des années plus tard, je suis repassé à pied, le café-bar avait fermé, monument devenu invisible. dans cette ville de crue, le bistrot était cuit. N'empêche que toute ma vie, je me rappellerai être allé au café en bateau. J'ai quelques larmes qui débordent, une crue de chagrin quand je pense que les pieds dans l'eau, on avait le sourire aux lèvres. Mais si le bistrot n'avait pas été là, on aurait été noyé de chagrin. Un comptoir c'est solide comme un roc. Mais trop facilement soluble dans le temps.

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