La Sécu ne s'appelait pas encore la Caisse primaire d'assurance maladie. Elle s'appelait la Sécu. Petit rappel historique : le 19 octobre 1945, le Gouvernement provisoire de la République française institue officiellement, par ordonnance, le régime général de la Sécurité sociale mis en place par le ministre du Travail Ambroise Croizat.
A Vierzon, l'Ehpad du Clos-du-Roy porte le nom d'Ambroise-Croizat.
Ma mère disait "demain, il faut qu'on aille à la Sécu", et c'était, avec d'autres sorties singulières, comme l'arrosage des plantes sur les tombes de mes grands-parents au cimetière de la ville, l'une des plus... singulières !
Combien de temps ai-je passé, avec ma mère, à attendre à la Sécurité sociale ? Le bâtiment a été construit au Tunnel-Château, il domine toujours le quartier, depuis des décennies, même si les choses, à l'intérieur, ont radicalement changé.
Il marque une époque où les besoins sociaux ont frasé un quartier entier (celui qui se trouvait de l'autre côté du Beffroi), pour y ériger des immeubles, la Caisse d'allocations familiales, une école, la Sécu...
Je ne savais pas trop ce qu’on venait y faire, mais je savais qu’il fallait attendre, comme chez le médecin, par exemple, comme on attendait chez le docteur Dupuis, rue Victor-Hugo, avec ses chaises de jardin en fer peintes en blanc. Je savais qu'il fallait chuchoter et attendre, jusqu'à notre tour.
La Sécu était un endroit magique, ça grouillait de partout : les gens assis qui attendaient, les gens debout au comptoir, les gens derrière le comptoir. Vous voyez les cubes avec des lettres ? C'était le nombre de guichets ouverts.
Ma mère prenait un ticket et on allait s'assoir pour attendre et attendre. Avec un peu de chance, ma mère connaissait quelqu'un et elle discutait comme elle le faisait chez le boucher ou chez le boulanger. J'écoutais, je n'avais rien d'autre à faire.
Elle allait faire enregistrer ses feuilles de soins pour être remboursée. Derrière les guichets, je me souviens encore d'une machine, sorte de monte-charge silencieux, qui contenait les centaines et les centaines de dossiers des Vierzonnais, la guichetière faisait tourner "le manège" jusqu'à trouver le dossier de ma mère.
Je me souviens encore du comptoir, trop haut pour un petit garçon comme moi. La Sécu ! C’est un endroit que j’avais complètement oublié et qui m’est revenu à la vue de ces photos de l’intérieur.
Il y avait un autre endroit que j'affectionnais, la Poste à côté de la mairie, avec un haut comptoir également, les cabines téléphoniques, et une sorte de cadre animé qui me fascinait. C'est fou comme en tirant sur le fil d'un souvenir, on arrive à en délier toute une pelote.
R.B.