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Vierzonitude

Le blog que personne ne lit... mais dont tout le monde parle


#monvierzon (2)

Publié par vierzonitude sur 29 Octobre 2024, 14:33pm

#monvierzon (2)

Si j'étais cet homme

 

et cette femme,

je regarderai, comme eux, le bâtiment au fond, un ancien préau, aujourd'hui fermé, sur les murs duquel j'ai fracassé mes cris de gosse, mes rires, quelques pleurs aussi. 

Comme eux, je regarderai cet alignement de fenêtres qui n'a pas changé, comme une sorte de phare sur la rive, de l'autre côté, celle de mon enfance, de la sienne aussi, peut-être qui sait ? 

Comme eux, je resterai assis en convoquant les fantômes qui sortent de l'eau et collent leurs têtes molles sur les barreaux qui séparent la cour de récréation du reste du monde. Je me souviens avoir regardé souvent de l'autre côté, non pas parce que je me sentais prisonnier, mais juste pour être à la frontière de ce que j'étais élève, les pieds dans l'école et de ce que j'étais enfant, sur le pont Molière que je parcourais quatre fois par jour, avec la main de ma mère dans la mienne.

Comme cet homme et cette femme, assis, face à leur propre contemplation, je ferai le tri dans ma mémoire, un grand tri, j'ouvrirai les portes des placards, les tiroirs même secrets, je regarderai dans les cartons, je fouillerai dans les boîtes pour reconstituer mes souvenirs d'élève. J'ai toujours eu énormément de tendresse pour cette école, et leurs institutrices et instituteurs. 

La première d'entre elles, Mme Da Cruz, en cours élémentaire. C'est elle qui m'a implicitement encouragé à écrire, à ne pas renoncer à ce pouvoir des mots, elle avait dans son tiroir un ou plusieurs récits et des décennies plus tard, sur le trottoir de la rue Voltaire, devant la maison de la presse qui avait fermé, j'avais décidé de dédicacer mon livre "Ta Belgitude, Ma Vierzonitude", parce que je n'admettais pas que la dernière librairie ait pu fermer ainsi et elle était venue, mon institutrice et son ancien élève et mon bouquin entre nous deux.

Il y avait aussi Me Gendre (ou Legendre, ah la mémoire) et M. Serpaud, avec son chapeau. Je ne l'ai pas eu comme instit, mais déjà, dans la cour de récré, il ne semblait pas rigoler beaucoup, la discipline avait un sens et un sens particulièrement aigu pour lui. 

Enfin, le directeur, M. Hoyez, et son pupitre. Mon dernier instit avant mon entrée au collège et mes dernières fondations de gosse ont été coulées là, entre le rotin, le macramé, et des lignes d'écriture tant il n'arrivait pas à me relire, c'est toujours le cas aujourd'hui.

Comme eux, là, je regrouperai tout ce dont je me souviens pour tenter d'aller de l'autre côté, sans bouger, sans me lever, aux côtés des fantômes qui auraient décidé de retourner dans l'eau. 

P.S : si vous me lisez et que vous avez fréquenté l'école Charot entre disons entre 74 et 78, faites moi signe...

R.B.

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