Ainsi, il ne faudrait pas parler des faits divers de Vierzon sous prétexte que cette réalité, dévoilée au grand jour, ferait grimper le Front national et agacerait la gauche radicale. Ainsi, il faudrait avoir des scrupules à dire qu'il y a eu une bagarre générale sur l'esplanade de la Française samedi soir, ou que les locaux de la CAF de Vierzon ont été cambriolés ou que Vierzon, comme d'autres villes, sont confrontés à une délinquance qui agace. Ainsi, il ne faudrait rien dire, surtout ne rien dire, tout cacher, ne rien laisser transparaître pour éviter que la bête ne se nourrisse de cette réalité là. Courte vue... Courte vue qui arrange d'ailleurs les politiques en place car en ne disant rien, ils font acte factice de lutte contre le Front national (certains sont persuadés encore que le vote F.N n'est pas un vote d'adhésion mais de réaction). ET en même temps, ils plaident pour leurs chapelles politiques : regardez, grâce à nous, Vierzon est calme.
Interrogé dans le Figaro du vendredi 3 février, un article tant décrié, le maire donne sa version des faits dans le Petit Berrichon. Etrange pratique. Le journal dénonce le "parisianisme" des journalistes du Figaro, histoire de maintenir intact la vieille querelle entre Paris et le reste du monde et bien entendu, son appartenance politique droitière. Cela justifierait donc que l'article paru dans le Figaro sur l'insécurité à Vierzon, serait de mauvaise foi, infidèle à la réalité, tout simplement parce qu'un journal de droite écrit sur une ville de gauche. Crime de lèse-majesté. L'entre soi politique est encore le meilleur des mondes. Ce qui étonnant, c'est qu'il y a quelques années, quand Libération, journal de gauche, était venu taper Vierzon (Jean Rousseau en était le maire), la gauche n'avait pas moufté... De même, lorsque l'Humanité rédige ses cahiers de doléances à partir de Vierzon ou interviewe le député communiste, aucun commentaire non plus sur une certaine complaisance de classe politique. Comme quoi, la mauvaise foi est bien une question politicienne.
Donc, le sous-préfet de Vierzon et le député-maire de Vierzon ont trouvé un stylo complaisant pour se dédire de leurs propos et dénoncer pour le premier, une incompréhension, pour l'autre un complot ourdit par de sombres officines... C'est carrément carnavalesque. Si les personnes interviewées dans le Figaro sont si sûres d'elles de la déformation de leurs propos et de leur désinformation inhérente, il existe le droit de réponse qui, sous certaines conditions, permet à tout à chacun de s'expliquer dans les colonnes du canard incriminé. Mais on dit tout dans le Petit Berrichon, comme s'il fallait à tout prix qu'il y ait un journalisme de gauche contre un journalisme de droite, un journalisme honnête contre un journalisme malhonnête, un journalisme parisien et provincial, un journalisme digne d'intérêt et un journal indigne d'intérêt, un journalisme qui caresse dans le sens du poil et l'autre qui hérisse.
Le débat sur l'insécurité n'apporte aucune solution à une ville qui souffre. Comme pour l'affaire Fillon : le plus important, c'est de savoir qui a vendu la mèche, les faits après tout, même s'ils sont réels, ont peu d'importance. On préfère faire la chasse à celui qui a rendu possible la publication de cette réalité plus que la réalité en elle-même. Voilà comment on fonctionne aussi à Vierzon. A la sensibilité politique, uniquement, aux calculs politiciens, essentiellement. Alors, chut sur toute la ligne. Cachez cette délinquance qu'on ne saurait voir. Cachez tous les problèmes jusqu'aux prochaines élections. Après peut-être, on verra si on a le temps d'en parler...