En juin 2019, le marché qui se tenait place Fernand Micouraud est monté sur la place Jacques Brel. Le marché place Foch n'existait plus. Celui place du Mail est resté à sa place.
Les marchés sont, à Vierzon, une tradition têtue, un rituel immuable. Ils balisent la semaine, avec leurs rendez-vous qui se comptent sur les deux mains. Les deux plus importants se situent, en centre-ville, le samedi, et dans le quartier de Sellier, le mardi.
Le mercredi, le quartier de Villages, jadis commune indépendante jusqu'en 1937, conserve, avec un oeil rivé sur ses traditions, son marché au pied de l'ancienne mairie. C'est l'occasion de se revoir, de discuter et de boire un verre au café tout proche. Là-dessus, les convictions n'ont pas varié. Des marchés, des clients, des habitudes, la pendule hebdomadaire n'est jamais grippé. Les marchés vierzonnais sont installés dans le paysage.
Celui hebdomadaire du samedi, en centre-ville, est millénaire. La charte de l'abbaye de 843 octroie aux moines les revenus de deux foires à la Sainte-Perpétue, la Saint-Pierre et la veille du dimanche. Les différentes places de Vierzon se spécialisent dans la vente de certains produits. Le marché au vin s'enracine rue de l'Etape (inventaire de 1809). Le marché aux porcs s'implante place du tunnel-château avant l'arrivée du chemin de fer.
Le beurre et les produits laitiers voisinent place de l'hôtel de ville. Les légumes investissent la rue Maréchal Joffre et les grains, la place du marché au blé. Pour passer d'un marché à un autre, notamment celui de la place de l'Etape à celui de la place du Marché au Blé, les Vierzonnais pouvaient emprunter la rue du Chevrier, dite aussi ruelle du Chevrier, dans la vieille cité.
En 1842, le marché aux grains est l'un des plus considérables du Cher. Les routes de Paris à Toulouse et celles menant à Bourges, Romorantin et Issoudun, accentuent le besoin de commerces. S'ajoutent les activités industrielles de la ville avec les Forges, la navigation sur le Cher et en même temps sur le canal de Berry, les voisins solognots sont autant de clients friands. Sans oublier la population vierzonnaise qui s'accroit au rythme de l'expansion industrielle.
D'ailleurs, la place idoine, baptisée Vaillant-Couturier, résiste encore et toujours. Pour les Vierzonnais, elle reste la place du marché au blé. En 1872, d'ailleurs, elle est agrandie, après la destruction de la rue de la Boucherie. La place du Marché au Blé est d'autant plus emblématique, qu'elle concentre le coeur de la vieille cité médiévale.
Sur de nombreuses cartes postales anciennes, les marchés de Vierzon s'étalent d'une manière élégante et hétéroclite. Place du Mail, en ville, on voit de vieilles dames vendre le contenu de leurs paniers. Les quartiers de la ville vivent, d'une façon dépendante, au rythme des marchés. Pour la petite histoire, l'administration révolutionnaire en créé un nouveau, le dimanche devant... le parvis de l'église Notre-Dame, abandonné seulement en 1872, à la suite de nombreuses plaintes des desservants de l'édifice religieux. La cohabitation est vue d'un très mauvais oeil.
Aujourd'hui, le marché du centre-ville maintient une tradition très ancienne. Et malgré son dynamisme, le territoire qu'il occupe ne cesse de se rétrécir. Chaque semaine, les premiers arrivants s'installent à partir de 3h30. Sur la place de l'intendance, près de la mairie, on y trouve les producteurs locaux de fromages, beurre, oeufs, vins, bouchers, rôtisseurs. La place Aristide-Briant se hérisse de maraîchers, poissonniers, fleuristes et la place Foch se couvre du non-alimentaire, principalement des vêtements. Paradoxalement, la place du marché au Blé finit par abandonner son commerce ambulant.
Dans les années 1980, le marché du samedi s'y étend encore. Les Vierzonnais grimpent ainsi la rue Maréchal Joffre pour s'y rendre. Peine perdue. Les marchands font de moins en moins d'affaires et la place du Marché au Blé quitte le périmètre du marché hebdomadaire. Au grand dam des commerçants du quartier. Aujourd'hui, le marché est une valeur sûre mais, à l'oeil, on constate que les activités évoluent.
Au regard de l'animation engendrée par les marchés traditionnels, certains quartiers tentent l'aventure, avec plus ou moins de bonheur. Etape nouvelle, les nouveaux quartiers nés des cités construites à la verticale de la fin des années 1950 jusqu'aux années 1970, se lancent également dans l'organisation de marché.
Celui du Clos-du-Roy, par exemple, devient très vite renommé. Il se déroule le dimanche matin et rompt avec la tradition dans la nature des activités ambulantes qu'il offre. Il préfigure le marché de Sellier, implanté chaque mardi matin. Son exotisme en fait sa réputation jusqu'à le hisser derrière celui du centre-ville. Une vaste place lui est dédié.
Place Marceau (place des Radis), une poignée de commerçants fidèles s'accrochent à leurs clients. Et inversement. Le quartier de Bourgneuf a essayé, à son tour, d'implanter un marché. Même chose dans le quartier de Chaillot, en vain. Celui de Villages est amoureusement entretenu. Dans les anées 1990, difficile de laisser vide la place du Marché au Blé. Depuis, chaque jeudi, quelques commerçants s'y retrouvent encore. Mais loin, très loin du faste qu'elle connut jadis.
Et un marché couvert ? Le projet, du moins l'idée, est l'Arlésienne qui court les allées. Certains y sont favorables, d'autres franchement opposés. Faut-il instituer un marché couvert quotidien ? Ou seulement hebdomadaire ? Et si oui, à quel endroit ? Régulièrement, la question traverse l'actualité. Régulièrement, elle ne trouve aucune réponse. D'abord parce que Vierzon ne compte pas de Halles comme Bourges par exemple, entre celle de Saint-Bonnet et celle au blé.
Toutefois, lorsque la société Case a fermé ses portes en centre-ville, la haute et métallique architecture a donné des idées : et si l'on créait un marché couvert à cet endroit ? Récemment, le vide de l'ancien bâtiment des Nouvelles-Galeries, en centre-ville, a réactivé les appétits. Sans démolir tout à fait le bâtiment ne pourrait-on pas y créer des halles ? Le septicisme est pesant. Surtout, une fragilité relative entoure l'activité des marchés qui parviennent à résister aux assauts de la concurrence de toutes sortes. Alors, une halle couverte ne risquerait-elle pas de déséquilibrer le bel ensemble ? Une raison essentielle de l'absence de marché couvert. Un juste ralliement à la raison.
(1) : Les principaux marchés : mardi, marché de Sellier; mercredi, marché de Villages; jeudi, marché au Marché au blé; samedi, marché en centre-ville.