A ce morceau de France qu'est Vierzon, que vous n'aimez pas, que vous n'aimez plus, que vous adorez;
à cette politique locale que vous aimez trop, que vous détestez;
à cette politique nationale dont les fruits tombent dans vos cours et vos jardins, jusque dans vos appartements sans soleil;
à cette ville punaisée au milieu du pays, bien servie, mal servie, tout dépend où l'on se place;
à cette ville si riche, à cette ville si pauvre, tout dépend où l'on regarde;
à cette façon d'être Vierzonnais, sur le marché du samedi, sur celui du mardi, même du mercredi, dans les rayons d'un hyper, chez son charcutier, son boulanger qu'a rouvert, aux Forges, à Villages, en Ville ou à Bourgneuf;
à ces commerces manquants dans la rue Joffre, aux autres qui ouvrent, à ceux qui tiennent le coup;
à ces faits divers dans le journal, à l'insécurité, subie ou fantasmée, au trop de caméras, au pas assez de caméras;
à ce canal en pointillé;
à cette politique politicienne;
à ce que disent les élus, à ce qu'ils ne disent pas, à ce qu'ils taisent, à ce qu'ils refusent de dire, à leur manquement, leur trahison, leur fulgurance;
au manque de décisions, aux prises de décisions, aux désaccords profonds, aux débats inexistants, aux discussions sur le trottoir;
à cette ville à la campagne, à ces quartiers historiques, à cet immobilier peu cher, au Beffroi qui sonne les heures;
à la petite histoire, à la grande histoire, à l'histoire qu'on met de côté, à l'histoire dont on parle trop, à celle dont on ne parle pas assez, aux tracteurs, à la Case, à mon père ouvrier;
à ces 27.000 habitants, heureux d'être là, malheureux d'y être;
aux défaitistes, aux optimistes, aux oui-ouistes, aux moutons, aux révoltés perpétuels, aux j'enfoustistes, aux empêcheurs de tourner en rond;
à ce qu'on peut améliorer, à ce qu'on peut changer, à ce qui restera ainsi, à ce qu'il est impossible de faire, à ce que l'on peut faire, tout de suite, demain, bientôt;
au charme d'un jardin art déco, aux musiques de l'été, au confort d'un spectacle, à un lycée de 130 ans;
à ce qui serait mieux, à ce qui serait pire, à ce que l'on serait si, à ce que l'on ne serait pas;
à Jacques Brel, à Edouard-Vaillant, à Félix Pyat, à Célestin Gérard, à celles et ceux qui font partie de l'histoire vierzonnaise, aux petits, aux grands, aux oublié,s à ceux de passage, à Saint-Exupéry venu à l'Hôtel du Boeuf; à Régine Deforges en vacances chez sa tante vierzonnaise;
aux meurtrissures, aux blessures, aux sourires et aux pleurs, au passé, au futur, au présent malgré lui;
à cette place Charlie qui n'existe pas; à cette manifestation un lendemain d'attentat contre un journal satirique; à ces paroles données contre l'obscurantisme et le fanatisme; à cette lumière qui nous éclaire encore;
il faudrait juste que cette fois-ci, Vierzon se hausse du col et ne se fasse pas honte, qu'elle puisse se regarder dans le miroir des autres, juste pour voir comment ça fait de ne pas être à rebours de l'histoire, juste pour voir comment ça fait de résister, vous savez, résister, ce mot que certains gardent en bouche depuis si longtemps. Il faudrait, juste cette fois-ci que Vierzon n'aille pas noircir ce sale tableau frontiste, qu'on ne nous punaise pas comme ville du Front, qu'on relève le front justement, celui que l'on a tous, et que pour cette fois-ci, vous rangiez votre politique politicienne suicidaire, celle qui fait qu'on en est là, celle qui fait que vous détruisez ce que vous ne pensez même pas à bâtir, celle qui fait que Vierzon reste à ce point différent.
Alors, pour cette fois, ne pensez pas en mélenchoniste, en filloniste, en hamoniste ou en poutouiste, pensez en Vierzonnais, regardez autour de vous, et pensez-vous sincèrement que mardi 9 mai, au matin, les enfants des uns et des autres, les nôtres, les vôtres, puissent franchir le portail de l'école dans une République frontiste ? Pensez-vous vraiment que le mardi 9 mai au matin, nous mettions tous les pieds, sans état d'âme, dans une République détenue par le Front national et que, dans la mairie de Vierzon, les conseils municipaux se tiennent sous l'oeil torve de la photo de Marine Le Pen ? Il ne suffit de ne pas le vouloir, il faut se donner les moyens nécessaires pour que surtout ça n'arrive pas.