Le concept de France périphérique développé par le géographe Christophe Guilly dans ses derniers ouvrages n'a jamais été aussi criant qu'aujourd'hui. En fait, seules les métropoles tirent leur épingle du jeu. Autour, la France périphérique (Vierzon avait été citée notamment dans plusieurs interviews de Christophe Guilly) se brosse, c'(est la laisser pour compte de la mondialisation. C'est le cas, par exemple, de la maternité du Blanc dans l'Indre, fermée et pour laquelle les élus se battent. C'est le cas des services (peut-être) supprimés à l'hôpital de Vierzon. Dans le cas du Blanc, la maternité la plus proche est à Chateaudun, quarante-cinq minutes de trajet. A Vierzon, ce serait Romorantin ou Bourges.

Mais pourquoi les grandes métropoles où se concentrent déjà l'emploi et les classes supérieures, phagocyteraient-elles aussi la France périphérique en voulant avoir le monopole des grands hôpitaux ? Difficile de tenir un discours de cohésion du pays quand tout contredit ce même discours. A Vierzon, on a bien vu le délitement des services de l'Etat, petit à petit, comme une marée descendante, tout part au large. Le tribunal d'Instance, le conseil des prud'hommes, le commissariat dont les locaux sont une insulte au travail que fait la police...

Même les médecins généralistes boudent le territoire (tout le centre de la France en fait sur une large surface). C'est pourquoi le combat des agents de l'hôpital de Vierzon et de l'intersyndicale est celui de la France périphérique de Christophe Guilluy, ces territoires devenus annexes refuge des plus pauvres quand l'immobilier ne leur permet plus d'habiter au centre des métropoles, par exemple. Il n'y a pas, ici, de discours de droite ou de gauche, d'extrême droite ou d'extrême gauche, il y a une réalité que constatent toutes les classes de la société. Bien sûr, certaines sont plus aptes à se déplacer, à aller ailleurs, à aller plus on, à s'offrir des soins.

Voilà pourquoi le combat actuel qui se joue à l'hôpital de Vierzon est une lutte acharnée contre l'agrandissement de cette fracture. Pourquoi Vierzon, sous-préfecture du Cher, deuxième ville du département derrière Bourges, subirait ce déshabillage constat en invoquant la fatalité ? Les territoire périphériques ne doivent pas être seulement les déversoirs des métropoles, les endroits où l'on cache ce que l'on ne veut pas voir ailleurs. Là-dessus, Christophe Guilly a parfaitement analysé les ressorts de ce qui se trame. Et chaque jour, ce qui se passe à l'hôpital doit nous le rappeler pour éviter qu'il existe des habitants de seconde zone.

A lire, son dernier ouvrage (en cours de lecture), "No society, la fin de la classe moyenne occidentale" aux éditions Flammarion.