"Aujourd'hui masqués, demain pucés". C'est ce qu'on pouvait lire, entre autres, comme slogan, samedi, à Bourges, dans la manifestation initiée par la Ligue des Droits de l'homme pour dénoncer le projet de loi sur la "sécurité globale" et les violences policières. Mais alors que vient faire ce slogan, anti-vaccins, dans une manifestation contre la "sécurité globale" ?
Au-delà de ce hiatus idéologique dans lequel les syndicats et les partis politiques présents ne devaient sûrement pas se retrouver, se pose une autre question : croire. En matière de religion, croire trop, aveuglément, sans réfléchir, revient à pratiquer le fanatisme, l'extrémisme, l'obscurantisme, comme on a pu en être malheureusement témoin, récemment. En dehors de la religion, le verbe croire a les mêmes extrémités radicales.
Trop croire en des choses non prouvées, c'est la même chose que croire en un Dieu dont l'existence ne repose que sur la force de sa croyance en son existence. Certains croient donc qu'à l'intérieur du futur vaccin contre le Covid 19, se cacheraient des nanoparticules capables de nous pister, au bénéfice d'un gouvernement "Big Brother", dans le sens but de nous inféoder. Mais à quoi ?
Ne parlons pas de complot, puisque ce mot même décrédibilise toute pensée contraire à la pensée, c'est ainsi que les tenants des pensées radicales non fondées ont réussi à tordre la sémantique pour se grimer en victimes du système. Parlons juste d'intelligence alors. Et comment expliquer à ces nouveaux obscurantistes que le simple fait de revendiquer publiquement de telles énormités, sur la voie publique, est antinomique de l'état dictatorial qu'ils dénoncent et qu'ils prévoient ?
Il est tout à fait possible de penser, aujourd'hui, en France, qu'un vaccin va "pucer" les citoyens, sans que cette affirmation repose sur une quelconque vérité scientifique. Mais justement, l'obscurantisme hors-religion, repose sur la défiance de toute information officielle, scientifique, gouvernementale, médiatique au prétexte qu'elles sont manipulées.
D'où cette engeance à créer de toutes pièces de nouvelles vérités, véritables défis à la lumière humaine, et d'y croire. C'est exactement la même chose que d'inventer un Dieu tout puissant pour contrecarrer les lois dites de "la nature", de façon à ne pas lui laisser le monopole de l'explication scientifique en lui opposant une théorie mystique qui échappe au bon sens.
C'est cette autre radicalité, cet autre obscurantisme, contre lequel il est difficile de lutter. Car l'absence de preuves est déjà une preuve que la vérité est manipulée. Il serait pourtant simple de se procurer une dose de vaccin, de la faire analyser pour se rendre compte de la supercherie intellectuelle que certains propagent à des fins étonnamment inexplicables.
Mais, comme pour Dieu, c'est impossible de prouver sa non-existence comme son existence. Pour les diffuseurs de ce genre de théories, il est impossible de prouver la non-existence des nanoparticules dans le vaccin car elles sont bien cachées, leur absence même est la preuve de l'efficacité du système mis en place.
On se demande juste ce que ce slogan vient faire dans l'abrogation d'une loi contre la sécurité globale. Preuve que les tenants de cette théorie n'y croient pas, pour avoir le besoin de persuader les autres. Comme le prosélytisme religieux : si la vérité religieuse était si évidente, quel intérêt à convaincre. Elle se suffirait à elle-même pour aimanter les foules.