Derrière la froideur d'une décision économique et d'une décision de justice, il y a des gens, des gens derrière une caisse, des gens qui remplissent des rayons de bouquins et de revues, de stylos et de papier, il y a des gens qui sont des clients, devenus des copains, des amis, la famille.
Derrière une décision abrupte qui ordonne la fermeture d'un commerce, il existe un biotope, un environnement, une vie qui s'est créée et qui s'est adaptée aux circonstances, qui a créé des habitudes, des pont, des tunnels pour relier d'autres gens. Un commerce c'est une histoire de gens. La librairie-maison de presse-papeterie n'était qu'une histoire de gens.
En dehors des bistrots, on ne voit pas d'autres endroits où se créent ce genre de tourbillons humains, où les uns aimantent les autres. Avec Jean à la manoeuvre, Nadine, Cécile et Valérie, en bas ou en haut, il y avait, tout auteur, gravitant, le peuple de la maison de la presse, des gens qui entrent d'un côté et qui ressortent de l'autre. Il y avait, parce que désormais, la maison de la presse est fermée.
On ne traversera plus le magasin, on ne verra plus, aux mêmes endroits, Nadine, Cécile, Valérie et Jean. Il y aura une vitrine vide. Il y aura d'autres habitudes mais chasseront-elles la mauvaise qui fait que les boutiques se vident ? Celle-ci était la dernière librairie indépendante. C'était la maison de la presse. C'était. Et il n'y a rien de plus désagréable que la conjugaison de l'imparfait et du passé simple.